mercredi 31 août 2011

Le défi de l'intégration des immigrants (1) Une tendance irréversible

Les migrations internationales font en sorte d'amener chez nous de plus en plus d'immigrants. Une nation ne peut pas « absorber » plus qu’une certaine quantité de nouveaux arrivants sous peine de se mettre en minorité. Ce serait comme tenter de conquérir un pays plus grand et plus populeux que le sien. La plupart des observateurs s’entendent là-dessus. Mais où est la limite? Le débat est en cours depuis un certain temps. Tout à tour, des sociologues, des ministres et même François Legault ont remis en doute la politique des portes grandes ouvertes.

Je suis heureux de constater qu’enfin, on a fini par dépasser le stade où poser la question, c’était passer pour xénophobe ou « nationaleux ». Il y a pourtant longtemps que les nationalistes québécois modernes, ceux qui dominent depuis les années 1960, ont inversé la relation négative qui existait entre l’immigration et la nation. Auparavant, il s’agissait d’un rapport d’exclusion : même les catholiques venus des autres pays et voulant s’installer au Québec étaient refoulés vers les écoles anglaises. L’Église catholique a même créé des paroisses « nationales » pour éviter que les brebis canadiennes-françaises ne soient en contact avec des influences étrangères.

Mais à la fin des années 1960, devant la chute de la natalité, les autorités politiques se sont donné pour objectif de faire jouer l’immigration en faveur du fait français et, par conséquent, de mettre la majorité québécoise en rapport d’inclusion avec les immigrants. Jusqu’alors, 80% des immigrants s’intégraient en anglais au Québec. Voici ce que déclarait le tout premier titulaire du ministère de l’Immigration du Québec, Yves Gabias, en décembre 1968 :
« Nos représentants du Gouvernement du Québec feront en sorte que les personnes qui demanderont à venir au Québec en seront qui pourront s’intégrer à notre communauté francophone et en plus désireront nous aider à perpétuer le fait français au Canada et en Amérique du Nord ».


Une des grandes réussites de la Révolution tranquille, c’est d’avoir obtenu le contrôle de l’immigration sur notre territoire : la sélection, l’intégration et la fixation des niveaux annuels sont maintenant entre les mains de Québec, pas d’Ottawa. De plus, avec la Loi 101 entrée en vigueur en 1977, les immigrants et leurs enfants sont scolarisés en français.

En 2010, le Québec a accueilli un nombre record de 54 000 immigrants. Déjà, en 2006, 11,5% des Québécois étaient nés à l'extérieur du Canada, par comparaison à 9,9% en 2001. (À noter que je ne compte pas ceux nés dans les autres provinces du Canada comme des étrangers. Et au train où vont les choses, ce n'est pas demain la veille que le Canada deviendra un pays étranger…)

Que nous réserve le recensement de 2011? Sans doute une surprise aussi grande que celle qu’on est en train de vivre aux États-Unis. Les résultats du recensement de 2010 sont rendus publics graduellement depuis quelques mois. À leur grande surprise, les Américains assistent à une diversification accélérée de leur tissu national. Un seul exemple : le nombre d’Américains d’origine hispanique a plus que doublé en 10 ans. Aujourd’hui, un mariage sur sept est interethnique. On prévoit qu’en 2042, les Blancs seront minoritaires au pays de l’Oncle Sam. 

Je risque une prédiction. La surprise du recensement de 2011, ce sera le nombre phénoménal de Néo-Québécois maintenant « en région », c’est-à-dire dans ce Québec dit « profond » ou traditionnel. En visite dans ma terre natale des Bois-Francs cet été, j’ai constaté qu’une bonne part des travailleurs agricoles était du Guatemala. Il ne s'agit dans ce cas que de travailleurs saisonniers, mais dans bien des usines et des chantiers, ils deviennent résidents permanents puis citoyens.

Travailleur agricole guatémaltèque dans un champ de bleuets

La présence d’immigrants dans les villes dites « secondaires » s’explique par le besoin de main-d’œuvre. L’intégration s’y fait dans des conditions fort différentes qu’à Montréal, le foyer principal des Néo-Québécois. D’abord, les nouveaux arrivants ne s’aventurent à l’extérieur de la métropole que lorsqu’ils sont certains d’avoir de l’emploi. Ensuite, contrairement à Montréal, la prédominance du français est évidente.

Autrement dit, le problème reste entier pour la région de Montréal : trop d’immigrants sont sans emploi, ou alors ils sont refoulés dans de sordides « sweatshops », des endroits qui échappent à la Charte de la langue française, sinon au ministère du Revenu. Le défi de l’intégration reste entier. C’est pourquoi le débat qui s’amorce est si important. À suivre…   

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