lundi 18 juillet 2011

La crise des partis souverainistes (1)

Voilà que le tonnerre gronde au-dessus des nationalistes québécois. Plus précisément, il pleut sur les partis indépendantistes: élimination quasi-totale du Bloc en mai dernier, puis division du PQ, suivie de son effondrement dans les intentions de vote au profit d’un parti qui n’existe pas. Dans le Devoir du vendredi 15 juillet, le député Bernard Drainville a lancé une consultation sur l'avenir de son parti. Pauline Marois doit vraiment être inquiète pour laisser un de ses fidèles poser un tel geste.

Il faut dire que la cause indépendantiste fait du surplace depuis le référendum de 1995. D'abord, ce furent les assauts du gouvernement fédéral: la distribution drapeaux canadiens, la loi sur la Clarté référendaire, l'Union sociale canadienne, les commandites d'événements culturels et sportifs, cela vous rappelle quelque chose?

Puis, vinrent les questionnements sans fin sur la notion de « Québécois ». Dans la foulée du discours malheureux de Jacques Parizeau, qui avait en grande partie attribué la faute de la défaite référendaire à « des votes ethniques », il avait fallu éliminer toute trace du méchant nationalisme « ethnique » canadien-français, et jeter le discrédit sur tout ce qui avait été hérité de la période de la « Grande Noirceur ». Rien de bon n’aurait précédé la « Révolution tranquille » et son intouchable « Modèle québécois ». Qu'on me comprenne bien: j’ai moi-même adressé de nombreuses critiques au traditionalisme dépassé qui avait cours au milieu du XXe siècle, je célèbre les réformes des années 1960 et 1970, et je partage l'aversion des modernistes pour un nationalisme d'exclusion. Mais est-ce une raison suffisante pour bannir toute référence au passé dans le discours nationaliste québécois contemporain? Si celui-ci n’est pas la poursuite – certes sous une autre forme – de la volonté de survie de l'ancien peuple canadien-français, a-t-il encore une raison d'être?

Malgré tout, les deux principaux véhicules du mouvement indépendantiste sont restés à flot depuis le dernier référendum: le Bloc québécois a remporté la majorité des sièges et le plus grand nombre des votes à toutes les élections fédérales sauf à celle de 2000, et le Parti Québécois s'est maintenu au pouvoir ou dans l'Opposition officielle à toutes les élections sauf celle de 2007. À qui la faute, pour la spectaculaire débandade des derniers mois : aux  partis souverainistes ou au peuple québécois?

Voyons la première hypothèse. Le Bloc et le PQ se sont institutionnalisés. Le premier a défendu les intérêts du Québec dans la fédération et le second semble de plus en plus chercher le pouvoir pour le pouvoir. À l'origine, ils sont nés de mouvements sociaux qui demandaient l'émancipation du Québec. Mais ils se sont adaptés au système politique canadien et ont oublié leur raison d'être. Ils ont cessé de cultiver la flamme qui semble s’être éteinte, faute de renforcement.

À mon avis, on a mis la charrue avant les bœufs. On s’est mis à agir et à penser comme si l’indépendance était chose faite et que le français était en sécurité dans cette partie de l’Amérique du Nord. Ainsi, on est passé trop vite à un nationalisme de type majoritaire, alors que le Québec n'est toujours qu'une province du Canada. On s’est aussi gaussé du succès des réformes de la Révolution tranquille des années 1960 à 1980, en particulier de la Loi 101, en oubliant que la pérennité de la société francophone n'est toujours pas assurée. Autrement dit, les partis politiques indépendantistes auraient bien peu fait pour maintenir la conscience de l'oppression nationale et celle-ci aurait faibli au point de disparaître. Bien plus qu’en 1980, nous vivrions dans « le confort et l'indifférence », comme disait Denys Arcand.

Voilà pour la première hypothèse. Elle part du postulat que le peuple québécois a soif de souveraineté, mais que les messagers de la cause, les leaders souverainistes, sont responsables de sa déconfiture. Mais se pourrait-il qu’aujourd’hui le projet indépendantiste ne soit tout simplement plus pertinent pour un nombre de plus en plus grand de Québécois? C’est ce que nous allons explorer dans le prochain billet.

1 commentaire:

  1. - Mais se pourrait-il qu’aujourd’hui le projet indépendantiste ne soit tout simplement plus pertinent pour un nombre de plus en plus grand de Québécois?

    Oui ça se pourrait fort bien selon moi.

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