lundi 2 septembre 2013

Pour cesser d’être étrangers à nous-mêmes

Il était temps que l’on s’y mette. Déjà dans les années 1980, des voix réclamaient un cours d’histoire du Québec au collégial. À l’époque, le gouvernement avait agi…  en créant un cours d’histoire de la civilisation occidentale! Depuis, le niveau de connaissance des jeunes sur le Québec ne cesse de diminuer. En novembre 2012, un rapport (disponible dans le site du Devoir à : http://www.ledevoir.com/documents/pdf/histoire.pdf) déplorait « l’état désastreux de l’enseignement de l’histoire nationale dans le réseau collégial public du Québec ».  L’annonce de la mise en place à l’automne 2014 d’un cours obligatoire d’histoire nationale démontre une volonté politique de combler cette lacune.

Les signes de la perte de signification de l’objet d’étude nommé « Québec » sont nombreux. J’ai parfois l’impression que pour faire des études sur le Québec, il est plus facile de s’exiler. Sait-on qu’il y a plus de 3 000 « québécistes » (spécialistes du Québec) dans 82 pays à travers le monde? À titre de membre de deux communautés universitaires, combien de fois ai-je vu disparaître des cours portant sur le Québec, ou bien le mot Québec dans l’intitulé d’un cours. Tout se passe comme si les universités, en concurrence à l’échelle mondiale pour l’embauche des professeurs et le recrutement des étudiants, avaient cessé d’être des institutions nationales. Ce n’est heureusement pas (encore?) le cas des cégeps.
 

Complétez l'énoncé: "S'il y a nation, il y a histoire nationale.
S'il n'y a plus d'histoire nationale, il n'y a plus de ___________.

Que savent du Québec les jeunes Québécoises et Québécois qui parcourent le monde? Paul Arsenault, de la Chaire en tourisme de l’UQAM, racontait récemment à la radio que lorsqu’il demande à ses étudiants combien ont visité trois pays étrangers, tous lèvent la main. Lorsqu’il leur demande combien ont visité trois régions du Québec, seuls quelques-uns se manifestent. Pas étonnant que plusieurs d’entre eux rentrent chez eux en disant : « J’ai rencontré des gens formidables qui m’ont parlé des coutumes et de la vie dans leur pays. Mais je n’ai rien su leur dire du Québec. » Toute une génération de jeunes adultes semble devenir de plus en plus étrangère à elle-même. Et c’est sans parler l’engouement pour les « blockbusters » du cinéma américain et pour la chanson d’expression anglaise, que tant de jeunes artistes embrassent sans la moindre hésitation. Ils semblent tout simplement avoir perdu le goût du Québec.

Dans un tel contexte, il est loin d’être certain que la seule francisation suffise à instiller une identité nationale québécoise chez nos compatriotes issu-e-s de l’immigration. À quoi bon vouloir intégrer les nouveaux Québécois, encourager leur participation civique et politique, et dessiner avec eux des projets de société, si personne ne comprend la société dans laquelle nous vivons? Avant de pointer du doigt l’individualisme, le matérialisme, la mondialisation et l’immigration pour notre manque de cohésion nationale, il serait temps d’utiliser nos outils collectifs, à commencer par le système d’éducation. 
C’est pourquoi j’applaudis, comme la Coalition sur l'histoire, à la mise en place d’un cours obligatoire d’histoire du Québec contemporain au collégial. Celui-ci renforcera le cours d’histoire du Québec des 3e et 4e années du secondaire de la même manière que le cours « Monde contemporain » de secondaire 5 renforce les cours d’histoire de secondaire 1 et 2.

 

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