mercredi 16 mars 2016

La joute virulente

Le Dr Barrette pratique la politique d’une manière traditionnelle. À Tout le monde en parle, il a dit que « la politique et une joute, et la virulence fait partie de la politique ». La politique est donc une arène, où le plus virulent gagne.

C’est cette manière cynique de pratiquer la politique qui provoque la désaffection de la population et en éloigne notamment les femmes. Cette culture politique est incrustée depuis longtemps dans la manière d’agir de nos partis politiques et de nos parlementaires. Elle se nourrit de la partisannerie.

Notre système parlementaire est composé d’hommes et de femmes, surtout des hommes, soumis à une trop grande discipline de partis. Selon la personnalité des personnes en place et le contexte du moment, l’atmosphère devient souvent hostile. C’est à ce moment que les plus virulents s’expriment sans retenue. Mes premiers contacts avec ce phénomène datent de trente ans, lorsque j’étais stagiaire à la Chambre des communes, durant le premier mandat des conservateurs de Mulroney. Il était impossible d’entendre les orateurs pendant la période de questions, car on s’envoyait des invectives des deux côtés de la Chambre. Il fallait utiliser les écouteurs et encore, on percevait les cris de ceux qui interrompaient la personne qui avait la parole.

Pour revenir à « joute politique », si elle consiste à faire preuve d’éloquence pour convaincre de ce qui qu’on considère comme la bonne marche à suivre pour résoudre des problèmes, bravo! On appelle cela du leadership. Mais on voit cela de moins en moins souvent. Trop de politiciens emploient un double langage pour cacher les enjeux et dissumuler leurs véritables raisons d’agir ou de ne pas agir. C’est ce que le Dr Barrette a fait, et il a même semblé s’en vanter. Il s’est par la suite excusé à contrecœur du langage qu’il a employé, mais jamais de son manque de transparence.


Le ministre de la Santé explique sa conception de la politique à la députée de Taillon.
Avons-nous compris quelque chose de l’enjeu qui était débattu avec Diane Lamarre? Non. Il n’est dès lors pas étonnant que des citoyens et des citoyennes se tournent vers les mouvements populistes qui veulent renverser les « vieux partis ». Cette attitude dévalorise la politique, un mécanisme qui est pourtant essentiel à la résolution démocratique des conflits au sein d’une nation. Est-ce qu’à force de couper la capacité de l’État depuis trente ans, la classe politique a renoncé à être autre chose que de pugilistes dans « joute virulente »?

Il n’est guère étonnant que la culture politique antagoniste qui est le résultat de notre système politique ultra partisan soit rebutante pour beaucoup de femmes. Elle l’est pour un grand nombre d’hommes aussi. Lise Payette l’a dénoncée il y a déjà très longtemps. Pour faire partie du pouvoir, il faut agir comme les hommes politiques le font depuis très longtemps. Or, ce ne sont pas les femmes en politique qui devraient s’adapter, ce sont les hommes qui doivent changer. La présence de plus de femmes en politique n’est pas seulement une question d’équité. Il en va également d’une culture politique plus saine.

Suis-je naïf, Docteur, ou peut-être féministe ?